Vous vous souvenez de Microcosmos ? Une ode à la photographie d’insectes. Une heure et quart de pur dépaysement capturé à la hauteur du sol, un énorme succès populaire et 5 César raflés en 1997. Dont celui de la meilleure photographie.
Ce film est le meilleur exemple que j’ai trouvé pour illustrer la fascination que peuvent exercer sur nous les insectes. Et la preuve que la photographie d’insectes vous ouvre une démarche puissante : montrer ce que les autres ne voient pas. Effet garanti sur vos spectateurs et spectatrices.
À condition que les photos soient réussies… Et c’est là que souvent ça se corse.

Non, il n'est pas nécessaire de posséder du matériel cher ni de mettre en oeuvre des techniques compliquées pour photographier les insectes.
La macrophotographie, associée à la photographie d’insectes, traîne une réputation peu engageante chez les photographes amateurs.
Elle serait technique. Elle demanderait du matériel macro spécifique et cher. Il faudrait des connaissances naturalistes et une patience infinie pour réaliser des photos qui sortent du lot.
Rien de tout cela n’est vrai.
Avec du matériel accessible vous pouvez composer de très belles images. Bien sûr, vous n’aurez pas la tête de la libellule en gros plan sans un objectif dédié à la macro. Mais vous pouvez photographier des ambiances au moins aussi captivantes, des insectes dans leur environnement, avec un zoom de kit.
Comme souvent en photo, en matière de macro ou proxiphotographie d’insectes ce n’est pas le matériel le plus important.
Suivez les 10 conseils ci-dessous et vous aurez parcouru une grande partie du chemin.
Photographiez les insectes de bonne heure.

Argus au petit matin : la lumière de l'aube est parfaite pour photographier les insectes.
La photo d’insectes appartient aux photographes qui se lèvent tôt : c’est sans doute le secret numéro 1 pour mettre toutes les chances de votre coté et photographier les insectes dans les meilleures conditions.
Et quand on dit “tôt” c’est VRAIMENT tôt. En été vous pouvez prendre vos premières photos d’insectes dès l’heure dorée, soit une trentaine de minutes avant le lever du soleil.
Pourquoi ?
Premièrement parce que c’est à ce moment-là que vous bénéficierez des plus belles lumières naturelles pour vos photos. L’aube offre une lumière chaude, douce et diffuse qui met les insectes en valeur.
Vous allez me dire que c’est valable pour tous les domaines de la photo nature. Certes.
Mais concernant la photo d’insectes, il ne s’agit pas seulement d’une histoire de belles lumières.
En effet, la deuxième raison pour laquelle vous devez programmer vos séances de macrophotographie d’insectes de bon matin est lié à leur comportement.
Les insectes étant des animaux « à sang froid », ils sont beaucoup moins actifs au sortir de la nuit, dans la fraîcheur du petit matin. Dès qu’il fait un peu chaud et qu’ils ont pu faire le plein de soleil matinal la plupart d’entre-eux sont trop actifs pour être photographiés tranquillement.
Photographier des insectes en mouvement peut rapidement vous donner envie de vous arracher les cheveux et de balancer violemment votre objectif macro. Les libellules et les papillons, qui sont parmi les insectes les plus photogéniques, sont terribles pour cela.
Bien sûr vous pouvez tenter des photos d’insectes en vol plutôt que posés. Mais c’est une autre histoire (et une autre paire de manches).

Dès que le soleil pointe le bout de son nez, photographier les insectes se complique sérieusement...
En macro ou en proxi-photo la mise au point et le cadrage sont déjà assez compliqués à réussir sur un sujet fixe.
Alors simplifiez-vous la vie et donnez-vous du temps pour tourner autour de votre sujet, pour travailler votre composition, pour faire une bonne mise au point. C’est un luxe que les insectes ne vous offriront pas pendant les heures les plus chaudes de la journée.
Photographiez les insectes par temps couvert.
Rien de pire pour une photo d’insecte que la lumière crue du soleil direct. Des ombres dures tapent sur le sujet, les nuances des couleurs disparaissent sous la profusion de l’éclairement, les contrastes peuvent vite devenir ingérables…
D’où l’avantage de photographier au lever et au coucher du soleil comme expliqué juste au-dessus. Mais dans certaines circonstances vous pouvez tenter une séance photo en pleine journée : lorsque le ciel est recouvert de nuages.
Pour capturer des photos d’insectes douces et enveloppantes ce sont des conditions idéales.
Un ciel complètement bouché agit en effet comme une énorme boîte à lumière. C’est toute la voûte céleste qui devient la source d’éclairement, et non plus ce petit point ponctuel et lointain qu’est le soleil.
La lumière qui se pose alors sur l’insecte est très uniforme : la nature vous offre un éclairage de studio géant.

Lumière douce et enveloppante pour cette punaise colorée photographiée sous un ciel complètement couvert.
Par temps couvert, vous pouvez donc vous permettre de photographier en milieu de journée (éventuellement en courant un peu après les insectes qui, nuages ou pas, seront actifs). Par grand beau temps à l’inverse vous devrez de toutes façons vous cantonner aux premières et aux dernières heures du jour pour éviter les lumières dures du milieu de journée.
Par temps bien gris vos photos apparaîtront aussi plus nuancées et plus saturées. La lumière diffuse aide à faire ressortir les couleurs des insectes et de l’environnement naturel.
Donc, la prochaine fois que vous voyez un ciel couvert de nuages, ne soyez pas déçu. Prenez plutôt votre appareil photo et votre objectif macro et allez profiter de votre spot préféré 🙂
L’ennemi n°1 de la photo d’insecte : le vent.
Dès qu’un peu de vent se lève, c’est tout le petit monde des insectes qui se met en mouvement. Les herbes ondulent, les feuilles tremblotent…
Faire une mise au point juste acceptable dans ces conditions tourne vite au cauchemar.
En macrophotographie les lois de la physique sont rudes : plus le rapport de grandissement de votre sujet augmente plus la profondeur de champ diminue. Concrètement, en vous approchant de l’insecte vous allez rapidement vous retrouver avec une zone de netteté de quelques millimètres devant et derrière l’endroit précis de la mise au point.
Au moindre souffle de vent, l’insecte et son support sortent de cette zone : la photo est complètement floue.
Et ne croyez pas que je parle des jours de tempêtes.
Même une brise légère peut transformer une séance macro en une ballade passablement frustrante. C’est pas le but 😉

Journée sans vent idéale pour photographier cette abeille en plein butinage sur les fleurs de lavande.
Il existe bien des pinces et accessoires que vous pouvez utiliser pour stabiliser les végétaux, mais c'est toujours une manipulation de plus et du temps passé autour de l'insecte avant de pouvoir le prendre en photo (donc autant de risque qu'il ne déguerpisse avant la photo).
Si vous voulez tester, vous trouverez ce type d'accessoire chez Jama par exemple.
Donc prenez bien garde à ce paramètre météo quand vous partez photographier les insectes. Choisissez des spots les plus abrités possibles et, les jours de vent, rabattez-vous sur des insectes qui ne fréquentent pas des supports trop mobiles.
Une macrophoto d’insecte réussie se prépare.
Si vous avez la possibilité et le temps, je vous recommande fortement de faire une reconnaissance de la zone sur laquelle vous envisagez de de photographier les insectes.
Alors oui, ça prend du temps. Mais vous le regretterez rarement.
Pourquoi un repérage est-il utile ?
D’abord parce que beaucoup d’insectes volants se choisissent un perchoir le soir, s’y posent et n’en bougent plus de la nuit. Ils ne redécollent que le lendemain quand il fait assez chaud pour cela.
C’est typiquement le cas des papillons diurnes et des libellules.
Donc si vous réussissez à en repérer quelques-uns à la tombée de la nuit, vous avez de bonnes chances de les retrouver rapidement la matinée suivante au même endroit, mais sous une belle lumière cette fois 🙂

Photographier les insectes au petit matin permet de les avoir tranquilles avant qu'ils ne soient trop actifs. Les avoir repérés avant peut vous faciliter grandement la tâche. Ici un flambé prend son premier envol du jour.
Ensuite, un repérage vous évitera de tâtonner et de perdre du temps au moment utile de votre séance : si vous suivez le conseil numéro 1 (photographiez les insectes tôt le matin), les minutes les plus favorables vont défiler vite.
Le repérage vous donnera à l’avance des tonnes d’informations précieuses pour attaquer les photos dès les premiers rayons du jour :
- comment et où vous placer pour obtenir les environnements les plus adaptés aux compositions que vous avez en tête,
- quel angle utiliser pour avoir ce beau fond bien lointain et donc bien flou,
- quels types d’insectes sont présents sur la zone,
- comment placer vos éventuelles lumières additionnelles,
- etc.
Vous pourrez ainsi planifier bien plus efficacement votre prise de vue, tout simplement.
À lire pour vous aider :
10 applications incontournables en photo nature
Pour vous aider à bien préparer vos sorties, à vous repérer sur le terrain, à prévoir la météo... Autant d'aides bienvenues pour photographier les insectes.

Pour les insectes, sortez vos longues focales.
Vous possédez un objectif 200 mm ? Ou peut-être un zoom de type 100-400 mm ? C’est parfait pour la proxiphotographie, surtout si vous ajoutez un tube-allonge à votre équipement. Et ce, pour trois raisons.
Tout d’abord, une longue focale vous permet de maintenir une certaine distance par rapport à votre sujet. Crucial lorsqu’il s’agit de photographier des insectes timides comme les papillons et les libellules.
Ensuite, un objectif de 200 mm ou plus va vous permettre de simplifier votre image et de focaliser l’attention sur votre sujet.
En deux mots : à taille de sujet équivalent dans l’image, une courte focale (par exemple un 35 mm macro) va faire entrer plus d’environnement dans le cadre qu’une focale plus longue. Donc avec une longue focale vous pourrez davantage exclure de votre composition photo les éléments gênants qui sont légions quand on fait de la proxi/macro (feuilles, herbes, tiges et branches en tous genres).

Utiliser une longue focale peut aussi vous aider à photographier des insectes dont vous hésitez à vous approcher de trop 😉
Le dernier gros avantage d’une longue focale en macro et en proxi est qu’elle vous permet d’intercaler plus facilement de la végétation entre votre appareil photo et l’insecte. Ces éléments dans le cadre mais complètement hors zone de mise au point créeront de beaux flous d’avant-plan dans votre photo.
Plus ces éléments seront proches de la lentille frontale de l’objectif et plus le flou sera prononcé et l’effet diffus.
De cette manière, même si votre sujet n’occupe qu’une petite place dans la photo, le fait de photographier à travers la végétation vous permet de “remplir” joliment votre cadre. C’est une technique qui transforme une photo d’insecte ordinaire en une image plus artistique et poétique.
Attention quand même, plus la focale augmente plus le risque de flou de bougé est important. Pensez bien à adapter votre vitesse d’obturation en conséquence, quitte à monter un peu dans les ISO.
Photographier les insectes à leur hauteur.
Si vous voulez immerger vos spectateurs et spectatrices dans votre univers photo et dans celui de l’insecte, évitez les images en plongée.
C’est une des erreurs les plus courantes : rester debout ou au mieux à genoux au dessus de l’insecte et pointer l’objectif photo vers le bas.
Résultat ?
Des photos qui ont tendance à écraser, à rapetisser, des sujets déjà pas bien gros.
Alors oui, vous allez vous retrouver souvent à ramper au sol. Mais ce sont les joies de la macro 😀 Si vous voulez des photos d’insectes immersives et qui mettent le sujet en valeur, placez-vous à sa hauteur. Montrez le monde tel que votre sujet le voit.

Cet insecte est surnommé "Cycliste maillot-vert" : il est vert et possède de gros cuissots comme les sprinters du tout de France ! Le photographier exactement à sa hauteur permet de mettre en valeur sa morphologie atypique.
Cette astuce est d’ailleurs une règle de composition très générale en photo, applicable aussi avec les enfants à la plage et autres mammifères sauvages.
Corollaire : pensez à votre confort (protections au niveau des genoux, petit coussin pour les coudes et éventuellement pour poser l’objectif…).
Tentez la photo d'insecte en noir et blanc.
J’avoue, ce n’est pas une piste que j’ai beaucoup explorée. Mais je trouve que le noir et blanc est largement sous-utilisé en proxi et en macrophotographie.
Cela peut donner une touche graphique très puissante aux images. Notamment avec de très forts rapports de grossissements.
En simplifiant l’image par élimination de la couleur, vous pourrez tenter de mettre l’accent sur les formes, les lignes et les textures des insectes et de leurs environnements naturels.
Alors si vous trouvez un sujet coopératif et qui vous inspire, tentez le noir et blanc et donnez-m’en des nouvelles en commentaires 😉

Le même insecte, le cycliste maillot-vert, que la photo précédente. En noir et blanc cette fois. Deux styles, deux ambiances complètement différentes pour une même scène.
Osez la double exposition.
Le principe de la double exposition est simple : vous prenez une première image de votre sujet, puis dans la foulée une seconde qui est « sur-imprimée » sur la première.
C’est une formidable technique pour obtenir des photos originales ou avec des tons pastel très doux, ou des ambiance oniriques. Vous allez pouvoir en une seule image rassembler votre sujet et des éléments de son environnement qui n’étaient pas présents dans le cadre initialement.
Je vous donne un exemple de double exposition avec la photo ci-dessous : une première exposition pour le papillon bien net, une seconde exposition en visant des bulles de lumière volontairement floues dans les feuillages environnants.
Au temps de l’argentique il fallait débrayer le moteur d’avancement du film pour faire cela. Avec les numériques c’est votre appareil qui va s’en charger tout seul dès que vous aurez trouvé la fonction « exposition multiple » dans la jungle des fonctions 😉
Sauf si vous êtes chez Sony, ne cherchez pas. La fonction n’est pas disponible.

Argus bleu en double exposition. Les photographies de papillons se prêtes particulièrement bien à la technique. La perte de netteté est -je trouve - moins problématique qu'avec d'autres insectes.
La double exposition est une méthode très créative qui va apporter une touche d’originalité à vos photos d’insectes. Les effets visuels obtenus ne peuvent pas être atteints avec une simple prise de vue.
Ne vous inquiétez pas si vos premières tentatives ne sont pas parfaites. Il faut souvent plusieurs essais avant d’obtenir un beau rendu global sans affadir le sujet. Mais le résultat en vaut la peine.
Ajouter des lumières artificielles.
Le coup de flash qui fait apparaître l’Insecte bien éclairé sur un fond tout sombre est passé de mode depuis belle lurette. Et personnellement je trouve que c’est tant mieux.
Pour autant, une petite lumière additionnelle – que ce soit au flash ou en lumière continue – peut transformer complètement votre photo.
Avec un ou deux petits panneaux à LED sur mini-trépieds vous pourrez glisser quelques touches lumineuses dans le fond ou générer un léger contre-jour qui fera ressortir les contours de l’insecte.
À l’inverse, si vous shootez avec le soleil en arrière plan, un réflecteur ou une petite lampe dirigée vers l’insecte vous permettront de conserver l’ambiance contre-jour tout en débouchant les ombres de votre sujet et d’en récupérer les détails.

Ajout d'une petite LED pour photographier ce papillon et le détacher du fond malgré le léger contre-jour.
Que vous vouliez rééquilibrer les lumières de votre image ou à l’inverse modifier complètement l’ambiance dans un but créatif, c’est toujours une bonne idée d’avoir un peu d’éclairage avec vous quand vous partez en sortie macro.
Et puis cela vous aidera aussi à ne pas trop monter la sensibilité dans les ISO, ou à atteindre des vitesses d'obturation correctes si vous photographiez les insectes à main levée.
Si vous suivez le conseil n°1 (réaliser vos séances le matin tôt), votre sujet vous laissera sans doute le temps d’installer quelques lumières.
Photographiez les insectes en raw.
Photographier les Insectes est un art difficile, mais vous pouvez sortir des images magnifiques. Alors autant ne pas confier à votre appareil le soin de produire le.jpeg à sa sauce avant de jeter votre négatif numérique à la poubelle !
Si vous ne savez pas à quoi je fais allusion, alors téléchargez vite mes deux bonus gratuits.
J'espère que cet article vous sera utile et vous aidera à faire de bonnes images. Et surtout qu'il vous aura donné envie de tester, si ce n'est pas déjà fait.
Si vous avez des questions ou des remarques, je suis à votre disposition dans les commentaires.
Faites de belles photos 🙂