Pas facile d'observer les animaux sauvages n'est-ce pas ?
Il y a deux ans quand j'ai aménagé à la campagne, je n'avais aucune idée des animaux qui pouvaient vivre à côté de chez moi. J'avais l'impression que mon petit village n'était pas intéressant pour les animaux. Je trouvais l'endroit banal. Je parcourais des kilomètres pour faire mes observations sur mes sites habituels, loin de ma nouvelle habitation.
En réalité je perdais du temps et je loupais de très belles observations et occasions de faire des photos. Sans le savoir.
Alors si vous avez l'impression que les animaux sont absents autour de chez vous, si vous n'avez aucune idée des observations toutes proches que vous pourriez réaliser, les pièges photographiques pourraient complètement changer votre regard sur votre environnement quotidien.
Il y a deux ans...
Je me souviens, j'ai installé mon premier piège photo sans conviction. Je venais de poser mes valises à la campagne. La vraie campagne, avec des vaches, des champs et des petits bois. Jusque-là j'habitais en centre-ville. À Rambouillet. Je sortais en forêt dans les profondeurs du massif, au sein des hautes futaies et en bordure des étangs brumeux. Belles observations et frissons garantis.
Alors, que pouvait-il y avoir à observer autour de mon petit village ?
Il y avait bien ce mélange de plaines agricoles et de bois. Mais cette petite mosaïque pouvait-elle remplacer les grands cerfs de la forêt et les balbuzards des étangs ? Je pensais que non. Et je continuais donc mes allers-retours dans la forêt, sans prêter attention à mon environnement domestique.
Les kilomètres et le temps perdu s'accumulaient. Et puis, prendre la voiture pour observer la Nature quand on habite à la campagne, on frôle l'absurde. Donc j'ai fini par me poser la question : y a-t-il aussi de belles observations à faire dans ces milieux habituellement parcourus par les chasseurs de faisans ?
Problèmes : je ne connaissais rien à la zone, et les étendues sont immenses !
Alors plutôt que d'aller battre la campagne, j'ai décidé de faire du repérage dans un rayon de 800 mètres maximum autour de la maison. Pour voir.
Quand j'ai posé mon piège photo dans le petit bois juste derrière, j'étais loin d'imaginer découvrir une telle diversité d'espèces !
En trois semaines ont défilé devant le piège renards, lièvres, chevreuils, blaireaux, sangliers, biches, fouines et tous les oiseaux du coin.
J'étais fasciné.
Résultats : j'ai maintenant 4 pièges pour tout savoir des habitudes des hôtes de ce bois. Je sais précisément où se reproduisent renards et blaireaux. Je sais où se reposent les chevreuils, où le mâle vient marquer et vers quelle heure. Je connais l'itinéraire de la fouine de service, etc..
Et dans la suite de cet article, je vous explique tout ce que j'ai appris pour bien utiliser les pièges photo.
1. Choisir le bon piège photo
Pas besoin du dernier modèle haut de gamme pour avoir un piège photo qui va vous donner de bonnes images. Gardez à l'esprit qu'avec un piège vous cherchez à faire de l'observation, à repérer les animaux. Pas à faire des tirages pour décorer le salon.
Alors certes, on peut gagner le plus prestigieux concours animalier avec un piège photo :
Mais globalement ce n'est pas la qualité d'image du piège qui va être le premier critère. Et de toute façon la majorité des modèles actuels possèdent des capteurs et des définitions largement suffisantes pour l'usage auquel on les destine.
Alors quels sont les critères pour choisir son piège photo ?
La vitesse de réaction du piège photo tout d'abord
C'est le délai entre la détection d'un animal par le piège photo et le moment de la prise de vue. Ce délai doit être le plus court possible.
J'ai deux modèles de pièges. L'un annonce un déclenchement de la photo/vidéo en moins de 0,1 seconde. Pour l'autre c'est 0,2-0,6 seconde. Et je constate des différences. Donc je dirais que 0,2 seconde est un bon temps de réaction "constructeur".
Au-delà vous risquez d'avoir un nombre important de clichés vides, ou avec les seules fesses de l'animal : le piège aura détecté la présence, mais le temps que le déclenchement se fasse le sujet sera déjà parti !
Le type de LED du piège photographique ensuite
Cela ne concerne que les observations de nuit, mais c'est un point fondamental. Lorsque la lumière manque, le piège va éclairer la scène à enregistrer avec des LED infrarouges. Il existe deux types de Led infrarouges :
- des LED produisant une lumière autour de 860 nm
- des LED produisant une lumière autour de 940 nm
On parle ici de longueur d'onde de la lumière émise, en nanomètres (nm). Mais ce n'est pas ça qui est important. Ce qui nous intéresse, c'est que les modèles à 860 nm se voient la nuit : la surface des diodes brille en rouge. C'est léger évidemment, mais quand même assez marqué pour perturber certaines espèces.
J'en ai fait l'expérience avec le renard, qui détecte parfaitement les pièges à 860 nm !
Les LED à 940 nm sont complètement invisibles. Les capteurs des pièges sont moins sensibles à cette longueur d'onde, on a donc une perte de "puissance utile". Mais en contrepartie, aucune perturbation pour les animaux. Ces LED à 940 nm sont vendues sous l'appellation "LED noires" ou "LED invisibles".
Regardez la réaction des renards éclairés par ces deux types de LED, ya pas photo :
Avec les LED noires 940 nm, aucune perturbation du comportement des animaux
Avec des LED rouges à 860 nm, la renarde détecte le piège qui se met en route. Elle se réfugie derrière la végétation et le scrute. Elle ne ressort qu'après avoir vérifié que tout va bien. J'ai donc remisé ce piège depuis cette vidéo.
En plus de ces deux premiers critères, il y a d'autres caractéristiques qui peuvent faire la différence, mais qui sont parfois difficiles à évaluer faute d'informations précises de la part des marques :
L'angle de champ de l'objectif
Plus il est large mieux c'est. Mais il est rarement indiqué. Il faudra souvent vous contenter d'un "wide-angle" un peu flou. Attention à ne pas le confondre avec l'angle du "PIR" qui, lui, est souvent indiqué. Le PIR, c'est le capteur infra-rouge, le détecteur de présence si vous préférez (il détecte les infra-rouge émis par les animaux à sang chaud).
Souvent l'angle de détection du détecteur est supérieur à celui de l'objectif. Comme ça le piège se déclenche avant que le sujet ne soit dans le champ de l'objectif. Avec des animaux avançant au pas ça fonctionne bien.
Le nombre de LED (et la puissance résultante)
Plus il y en a, mieux c'est. Dans la limite de votre budget. Là aussi difficile d'avoir de vrais chiffres de la part des fabricants dans les descriptifs. En général on vous indique la portée de la lumière. Et il faut croire le fabricant sur parole.
le camouflage de l'appareil
Ce n'est pas obligatoire, mais c'est plus de confort quand même d'avoir dès l'achat un modèle dans des tons camouflages correspondant à l'environnement auquel vous le destinez. Clairement, les animaux se moquent pas mal de la couleur de votre piège photo. Les miens étaient noirs mat à l'origine. Je les ai utilisé ainsi pendant des mois sans constater aucune différence avec deux autres modèles couleurs camouflage.
Je les ai peint à l'acrylique uniquement pour qu'ils soient plus discrets aux yeux des humains.
Pour les autres caractéristiques, soit tous les modèles sérieux se valent (autonomie, étanchéité), soit chacun apporte des petits plus qui améliorent le confort ou qui concernent des situations très particulières (accessoires de fixation, contrôle par smartphone, envoi des données à distance...). À moins d'avoir des besoins très spécifiques, vous devriez pouvoir vous en passer.
Concrètement, j'ai personnellement choisi un piège Coolife. Leur modèle LED noires coche toutes les cases et rentre dans mon budget (79 €, carte SD fournie). Pour le prix c'est parfait (les vidéos de renards qui illustrent cet article ont été faites avec ce modèle). J'ai pu en acheter quatre.
J'ai ajouté quatre cartes SD supplémentaires pour avoir deux cartes par piège (et ainsi en laisser une en permanence dans chaque appareil).
Oui, c'est un point à garder dans un coin de la tête : un seul piège photo ne suffit généralement pas pour faire du repérage sur toute une zone. Pour surveiller un petit bois de 3 hectares et ses abords, mes quatre pièges ne sont pas de trop.
L'appareil pour bien commencer sans se ruiner :
Si vous préférez des fabricants plus connus (mais plus chers...), vous pouvez choisir des marques comme Bushnell, Reconyx ou Browning. J'ai eu l'occasion de tester Reconyx et Bushnell. J'ai été impressionné par la qualité de fabrication chez Reconyx.
Mais pour mon usage (conditions climatiques de l'Île-de-France et pièges vérifiés toutes les semaines ou tous les 15 jours) je n'ai pas vu d'intérêt par rapport aux Coolife.
Personnellement j'ai choisi un modèle à petit prix pour avoir quatre pièges Coolife pour le prix d'un seul chez les trois autres marques et donc pouvoir quadriller bien plus finement la zone qui m'intéresse.
Mais pas que.
J'ai en effet rapidement arrêté de sécuriser mes pièges photo avec des câbles : ça fait des manips en plus, ce n'est pas pratique à ajouter au support, et c'est particulièrement visible dans le décor !
Donc avoir des modèles qui ne coûtent pas trop cher rendra moins pénible le vol d'un piège si cela arrivait.
3. Bien poser votre piège photo
Voici mes 9 conseils pour bien poser votre piège photographique :
Pour en savoir plus sur chacun de ces conseils, lisez les 9 principes pour bien poser votre piège photo. Vous pouvez aussi parcourir les blogs comme celui de Yannick qui utilise les pièges photo pour le chevreuil, pour voir les magnifiques résultats photo obtenus grâce à ces repérages automatiques.
4. Une fois le positionnement choisi :
Quels réglages utiliser ?
Franchement là encore tout dépend de ce que vous voulez découvrir pour vous-même à la lecture de votre carte SD, puis éventuellement partager.
Mais on s'émerveille bien plus facilement d'une scène de vie ordinaire en vidéo qu'en photo. On est d'accord ? Et sur le plan naturaliste et repérage en vue d'un affût photo idem : avec les vidéos vous saurez précisément d'où vient l'animal et vers où il repart, et vous allez pouvoir observer son comportement.
Donc j'aurais tendance à vous conseiller de choisir le mode vidéo seul (en 1080p). Et de régler la durée des vidéos sur 15 à 30 s. Personnellement j'ai mis 30 secondes. C'est souvent trop long (les 20 dernières secondes sont "vides") mais quand un animal reste, je suis bien content de capter ses comportements pendant tout ce temps 🙂
Activez l'enregistrement sonore. Les chants d'oiseaux sur les images c'est bucolique.
La sensibilité de la détection par défaut marche très bien chez moi sur "moyenne". Je n'ai jamais eu à y toucher. Mais si vous avez trop de vidéos vides, des déclenchement intempestifs, vous pouvez essayer de baisser cette sensibilité.
Combien te temps faut-il laisser le piège en place ?
Ouf, on y est, votre piège est en place et ça tourne ! Une première nuit passe, et au matin votre curiosité est à son maximum. Est-ce qu'il faut vous précipiter pour récupérer vos premières images ? Non certainement pas !
D'abord, on est le matin, une période pendant laquelle les animaux sont possiblement actifs. Donc attendez les heures creuses de l'après-midi. D'ailleurs c'est un conseil qui vaut aussi pour la pause initiale du piège photo et toutes les fois où vous allez y accéder : allez-y pendant les périodes de moindre activité des animaux.
Ensuite, moins souvent vous relèverez vos pièges plus vous préservez la tranquillité autour du piège, ce qui est essentiel pour préserver les habitants de la zone et capturer vraiment les passages et les comportements.
Aller changer la carte SD toutes les semaines est largement suffisant. J'y vais tous les 10-12 jours environ. Vous pouvez même oublier un piège plusieurs semaines, ça ne lui posera aucun souci.
À chaque fois que vous allez vérifier votre piège, retenez que vous avez TROIS choses à faire :
Oui c'est bébête comme rappels, mais un oubli est si vite arrivé 😉
Derniers conseils
Aujourd'hui vous n'avez sans doute pas idée de la vie qui peut foisonner à seulement quelques dizaines ou centaines de mètres de chez vous. Moi je ne réalisais pas qu'un simple bois en bord de route et de champ pouvait accueillir une diversité aussi importante.
En posant un piège photo bien placé à proximité de chez vous, vous allez faire de belles découvertes. Et c'est valable aussi pour des "spots" plus lointains ou des endroits que vous pensez déjà bien connaître. Le piège photo est vraiment un outil indispensable au photographe et au naturaliste.
Alors peut-être que vous vous dîtes "oui mais il nous explique qu'il habite à la campagne, facile de trouver des animaux avec ses pièges !". Oui c'est vrai, pour les urbains c'est peut-être plus compliqué, ou au moins différent. Mais certainement possible puisque la vie animale est aussi bien présente en ville, comme nous le prouve si brillamment Thomas Jean et sa minute sauvage.
De toute façon, urbain, rurbain, ou campagnard, si vous voulez obtenir capturer les passages des animaux cela va forcément vous demander un peu de patience et d'ajustement. Il va falloir trouver le bon emplacement, celui qui est à la fois sécurisé, autorisé et qui est a priori fréquentable par les animaux. Sans doute que vous allez devoir ajuster quelques réglages, peut-être déplacer le piège.
Mais si vous êtes un peu persévérant et que vous suivez les conseils de cet article, rapidement vous allez savoir qui se ballade dans le périmètre de votre/vos piège(s).
Un piège photo bien choisi et bien posé ne provoque aucun dérangement et donc aucune altération du comportement des animaux. Il est indétectable et peut rester en place sans broncher pendant des semaines, par tous les temps. Il est en repérage pour vous 24h/24 et 7j/7.
Si vous voulez vous y mettre rien de plus simple : repérez un endroit propice qui titille votre curiosité et procurez-vous votre premier piège photo 🙂 Et partagez vos découvertes.