Pourquoi photographier la Voie lactée ?
C'est vrai quoi : pour photographier la Voie lactée il faut parfois se coucher à des horaires impossibles et faire ses photos dans la nuit complète. Pas très confortable. En plus souvent il fait froid.
Il peut même y avoir du vent... Vous ne seriez pas mieux au chaud en studio pour une séance de portraits ?
Non.
Pourquoi ?
D'abord parce que photographier le ciel de nuit est passionnant ! Vous allez vous immerger dans la voûte céleste et passer des moments magiques sous les étoiles.
Ensuite parce que photographier la Voie lactée est une excellente occasion de redécouvrir des sites connus, de réinterpréter les paysages. La nuit étoilée tout change. Vous perdez vos repères pour en acquérir de nouveaux.
Enfin, parce qu'une belle photo de Voie lactée provoquera immanquablement ce fameux "effet waouh" sur votre entourage comme sur les réseaux sociaux.
Même si ce n'est pas forcément l'objectif premier, il n'y a pas de mal à flatter parfois son ego de photographe 😉
Qu’est-ce qu’une photo de Voie lactée ?
Une photographie de Voie lactée est un paysage de nuit dans lequel vous aller faire apparaître notre galaxie à travers le ciel étoilé. Réussir une belle photo de Voie lactée nécessite :
- une phase de préparation précise,
- une prise de vue adaptée à la faible lumière et au déplacement des étoiles,
- un traitement photo spécial pour le ciel nocturne.
Ce sont ces trois étapes que vous allez découvrir dans cet article.
Ce que vous devez donc garder à l'esprit, c'est que la photographie de Voie lactée est avant tout de la photo de paysage, avec ses règles de composition, saupoudrée d'une toute petite touche de photo astronomique. Exactement comme pour photographier les aurores boréales.
Est-ce difficile de photographier la Voie lactée ?
Non.
Une photo de Voie lactée est essentiellement une photo de paysage qui comporte quelques difficultés techniques. Mais rien d'insurmontable, y compris avec un appareil photo parfaitement standard.
On est loin de la complexité des images du ciel profond, des galaxies (enfin... des autres galaxies) et des nébuleuses.
Photographier la Voie lactée est accessible à tout le monde. Certain·e·s y arrivent même avec un smartphone.
Le but de cet article est de vous proposer une méthode pas à pas pour réaliser de belles images avec le matériel que vous possédez déjà.
Vous allez voir, cela n'a rien de bien sorcier. C'est parti :
Étape 1 : préparer votre séance photo de Voie lactée.
#1 Où photographier la Voie lactée ?
Une photo de Voie lactée est donc essentiellement une photo de paysage, mais avec des contraintes supplémentaires, notamment sur le choix du site.
La première étape pour faire une belle photo de Voie lactée est donc de trouver l'endroit propice, pas trop loin de chez vous si possible et correctement orienté.
Trouver un site adapté.
Ce site doit évidemment correspondre à vos goûts et envies, mais il doit aussi minimiser la pollution lumineuse nocturne qui risquerait de ruiner vos images.
Cette pollution lumineuse va se manifester par une dominante orange bien inesthétique sur vos photos. Et elle va sensiblement diminuer l'intensité lumineuse perçue de la Voie lactée :
Pour limiter ce phénomène, choisissez un site :
Pour éviter au maximum la pollution lumineuse il est donc important de savoir précisément où va se trouver le centre galactique au moment de votre photo.
Pour cela, l'outil ultime s'appelle Stellarium. Voici ce que vous pouvez faire grâce à lui :
Une fois votre sélection effectuée, n'oubliez pas de repérer de jour le site que vous avez choisi ! Ou alors arrivez en avance avant qu'il ne fasse nuit noire, pour pouvoir vous installer tranquillement et au bon endroit sans tâtonner.
Localiser la Voie lactée sur le terrain
La Voie lactée est souvent très peu visible, voire impossible à distinguer à l’œil nu. Pas très pratique pour faire un cadrage…
Pour savoir précisément où se trouve la Voie lactée, vous pouvez faire quelques photos test si vous arrivez à la discerner un peu, ou au jugé dans sa direction théorique. Votre capteur vous la révélera.
Vous pouvez aussi utiliser Stellarium dans sa version appli mobile. Le logiciel vous permettra de localiser précisément le bulbe de la Voie lactée juste en déplaçant votre téléphone devant vous. Cette version mobile vous coûtera quelques euros, mais c’est un must.
#2 Quand photographier la Voie lactée ?
Tout d’abord, il n’est possible de photographier la Voie lactée que si le ciel de nuit est assez dégagé. Vérifiez bien la météo, cela va sans dire 😉
Votre appli ou site météo préféré fera généralement l’affaire, mais vous pouvez aussi jeter un œil aux prévisions de couverture nuageuse précises sur des sites comme Ventusky.
Ensuite, faites attention à la Lune : elle peut vite se transformer en gros spot céleste et faire disparaître bon nombre d’étoiles.
Stellarium ou Photopills (excellente appli de programmation photo) vous permettront de choisir le bon moment pour photographier la Voie lactée : quand la lune est faible, voire absente.
Il est possible de photographier la Voie lactée en toutes saisons. Mais son inclinaison dans le ciel et la hauteur du bulbe au-dessus de l’horizon varient fortement d’un mois à l’autre, et au cours de la nuit.
Les nuits d'été sont les plus favorables, mais ce n'est pas pour cela qu'il faut vous interdire de tenter des images à d'autres moments de l'année 😉
Pour trouver l’heure idéale de prise de vue, vous pouvez là encore utiliser PhotoPills. L’appli vous indiquera les horaires de début et de fin de visibilité du centre galactique, ainsi que son niveau d’élévation au-dessus de l’horizon.
Si vous ne voulez pas payer pour Photopills, Stellarium sur PC fera le job aussi (en moins précis et moins pratique).
#3 Quel matériel pour réussir vos images de Voie lactée ?
À ce stade, vous savez où et quand vous allez photographier la Voie lactée. Il est l’heure de remplir votre sac photo !
L’idée de cet article est de vous permettre de photographier la Voie lactée avec le matériel que vous possédez déjà. Donc ça va aller vite 😉
Enfin, une séance photo de Voie lactée se déroulant de nuit, n’oubliez pas la lampe frontale (avec lumière rouge si possible), le petit siège pliant (ya pas de mal à être confort), et les vêtements adaptés.
Étape 2 : la prise de vue de la Voie lactée.
Les petits trucs à ne pas oublier : baissez au max la luminosité de votre écran LCD sur l’appareil photo. Désactivez toutes les stabilisations d’image. Par temps froid mettez un pare-soleil pour éviter la buée.
C’est bon vous êtes en place ? L’appareil est réglé pour enregistrer les fichiers raw, le trépied est posé, l’appareil solidement fixé dessus : il est temps de shooter.
Dans cet article, je vous explique comment faire les meilleures photos possibles de la Voie lactée sans matériel spécifique. Et pour cela je vous conseille de réaliser des prises de vue multiples.
Cela consiste à prendre plusieurs images identiques d’une même scène pour les empiler ensuite lors de la phase de retouche. C’est cette technique que je vous décris ici.
Grâce à ce procédé, vous allez diminuer de manière très importante le bruit de vos photos de Voie lactée, et recueillir un signal lumineux beaucoup plus intéressant.
Bien sûr, il est tout est tout à fait possible d’obtenir des photos sympas de Voie lactée en faisant une seule prise : focale 20 mm, ISO 3200, f/2.8 et 20 secondes de pose. Clic-clac c’est dans la boîte.
Mais le résultat sera toujours très loin de la qualité d’une photo de Voie lactée empilée.
#1 Réglez votre appareil photo :
Une fois que vous aurez fait votre cadrage et votre mise au point (c’est l’étape d’après), moins vous toucherez à votre appareil mieux ce sera. Faites donc les réglages d'exposition (vitesse / ouverture / sensibilité) en premier.
Tous ces réglages se font à la main dans le mode Manuel "M". Vous n'avez besoin d'aucun automatisme.
Quelle vitesse utiliser pour la Voie lactée ?
Plus vous ferez entrer de lumière dans l’objectif, mieux ce sera. Donc la réponse est simple : utilisez le temps de pose le plus long possible avant qu’un flou de mouvement des étoiles n’apparaisse sur l'image.
Rotation de la Terre oblige, la Voie lactée se déplace en effet assez vite dans le ciel. Si vous dépassez un certain temps de pose, les étoiles vont donc « baver », voire carrément former un filé. Et ce n’est pas le but ici.
Ce temps de pose maximum avant qu’un flou n’apparaisse dépend de la focale de votre objectif et de la taille du capteur de votre appareil photo, mais aussi de la définition du capteur et de l’usage final que vous voulez faire de vos images.
Une base de départ est la « règle des 500 » : vous divisez 500 par la focale de votre objectif, et vous avez le temps de pose maximum en secondes.
Si vous avez un capteur APS-C ou micro 4/3, il faut réduire ce temps proportionnellement au facteur de recadrage du capteur (diviser par 1,5 ou 2 respectivement).
Pour faire simple voici un petit tableau indicatif des temps de pose maximum en fonction de la focale de votre objectif (en mm) et de la taille de votre capteur :
FOCALE (mm) | PLEIN FORMAT | APS-C | MICRO 4/3 |
---|---|---|---|
10 | 50 | 33 | 25 |
14 | 36 | 24 | 18 |
16 | 31 | 21 | 16 |
20 | 25 | 17 | 13 |
24 | 21 | 14 | 10 |
28 | 18 | 12 | 9 |
35 | 14 | 10 | 7 |
50 | 10 | 7 | 5 |
Temps de pose maximum en secondes
Personnellement je trouve que sur mon plein format de 26 millions de pixels cette règle des 500 est un peu trop souple. Je réduis souvent d’un tiers le temps de pose qu’elle indique.
Quelle ouverture devez-vous choisir ?
Facile : utilisez simplement l’ouverture la plus grande permise par votre objectif photo.
Pour photographier la Voie lactée vous devez faire entrer le plus de lumière possible.
Si vous avez un objectif très lumineux, ouvrant par exemple à f/1.4 ou f/1.8, vous pouvez éventuellement fermer légèrement le diaphragme pour réduire un peu le vignettage et les aberrations chromatiques.
Quelle sensibilité utiliser pour photographier le ciel de nuit ?
La sensibilité ISO doit être assez haute pour vous permettre sur le terrain de visualiser quelque chose sur l'image qui apparaît sur l’écran arrière de l’appareil photo.
Les valeurs entre 1600 ISO et 6400 ISO sont parfaites pour cela.
Plus bas que 1600 ISO vous risquez de ne rien voir de vos photos pendant la prise de vue (embêtant pour vérifier la mise au point ou ajuster le cadrage).
Au-delà de 6400 ISO vous allez juste faire apparaître du bruit pour rien.
La sensibilité ISO à la prise de vue n’est en réalité pas très importante pour la photo finale : elle n’est qu’une amplification électronique du signal lumineux. Vous pouvez faire peu ou prou la même chose ensuite avec votre logiciel de retouche.
Ce qui compte vraiment pour faire une belle photo de Voie lactée, c’est la quantité de lumière qui vient « frapper » le capteur. Et ça, ça ne dépend que de la vitesse et de l’ouverture. Pas de la sensibilité.
Ces histoires de vitesse/ouverture/ISO ne sont pas claires ?
Téléchargez mon guide gratuit où je les explique simplement.
#2 Réussir votre mise au point sur la Voie lactée.
Voici la recette pas à pas :
/!\ La mise au point sur les étoiles n’est jamais en butée « infinie » de la bague.
Le point se trouve généralement un poil devant. Il faut souvent tâtonner un peu et plisser les yeux /!\
Quand vous pensez avoir fait une bonne mise point, ne touchez plus à aucune des bagues de l’objectif : ni celle de la mise au point ni celle du zoom (si vous utilisez… un zoom).
Il y a quelque chose de déstabilisant et magique à la fois lorsque vous photographiez la Voie lactée : vous ne voyez rien à l’œil nu. Ou pas grand-chose. C’est normal, il fait nuit 😉
Ça fait bizarre de cadrer face à du noir. Mais faites confiance à Stellarium, la Voie lactée est bel et bien là en face. La magie va opérer quand vous allez visualiser vos images au dos de l’appareil photo !
C’est bon ? Vous avez fait deux/trois images test ? Le cadrage et la mise au point vous conviennent ? Alors GO !
#3 Prendre vos séries de photos de la Voie lactée.
Maintenant que tout est prêt, vous allez pouvoir prendre vos photos. En séries.
Pour chaque cadrage choisi, vous allez prendre à la suite une dizaine de photos avec les mêmes réglages d'exposition.
Pour cela vous pouvez utiliser un intervallomètre externe ou celui intégré à votre appareil photo s’il en est équipé. Ou faire appel à votre télécommande.
Sinon, déclenchez à la main fonctionnera très bien, à condition que vous activiez le retardateur (2s de délai) pour éviter tout flou de bouger dû à la pression sur le déclencheur (oui, les moindres vibrations vont affecter l'image finale).
Cette technique va permettre de combiner ensuite toutes les photos d’une même série entre elles. C’est l’empilement, grâce au logiciel de retouche gratuit dont je vous montre le fonctionnement dans la section suivante.
Ainsi, vous allez maximiser le signal lumineux reçu et réduire drastiquement le bruit numérique de vos images.
Vous pouvez faire des séries plus importantes que 10 photos, surtout si vous savez que votre appareil produit beaucoup de bruit à hauts ISO. Mais avec 10 images de Voie lactée à empiler, l’amélioration de la qualité est déjà spectaculaire.
Petit truc : si, comme c’est probable, vous shootez plusieurs séries pendant une même séance, prenez une photo noire entre deux séries pour vous repérer ensuite dans vos fichiers sur la carte SD 😉
#4 Enregistrer vos "darks"
Des « darks » ? Kézako ?
Les dark sont des photos complètement noires (dark…), prises dans les mêmes conditions que vos photos de la Voie lactée, qui vont permettre lors du traitement de supprimer un type de bruit particulier, spécifique à VOTRE capteur.
En clair, avant de remballer le matériel vous allez remettre le cache sur l’objectif, et prendre des photos avec les mêmes réglages d'exposition que lors de vos photos de Voie lactée.
Si vous avez fait des séries de 10 photos, une série de 10 darks sera suffisante.
Cette étape n’est pas indispensable, mais ça vaut vraiment le coup de prendre 5 minutes pour la réaliser.
Étape 3 : retouchez vos photos de Voie lactée avec deux logiciels gratuits.
Vous avez passé un super moment dans la nuit sous un beau ciel étoilé ? Vous revenez de votre séance de prise de vue avec une carte mémoire pleine de photos de Voie lactée ?
Bravo.
Il va falloir maintenant transformer tout cela en images finales. C’est le rôle du traitement et de la retouche : aligner les images d’une même série, car d’une photo à la suivante la Voie lactée a bougé, et les empiler.
Puis retoucher l’exposition, les contrastes et les couleurs pour une photo qui claque !
Je vous présente ici une méthode simple en deux étapes pour traiter vos images. Chacune utilise un logiciel gratuit.
/!\ Il est indispensable d'avoir réglé votre appareil sur "raw" pour tirer le meilleur des étapes suivantes /!\
#1 Alignez et empilez avec Sequator
Avec Sequator, vous allez pouvoir :
Une vidéo vaut mille mots. Voici une démonstration pas à pas d’alignement et d’empilement avec Sequator :
#2 Retouchez vos images avec darktable
Darktable est un logiciel de traitement des fichiers raw. Comme un lightroom, mais libre et gratuit. Si vous utilisez déjà un autre logiciel performant de retouche photo (Lightroom, Capture One, Dxo…), vous y trouverez les outils équivalents à ceux que je présente dans darktable.
Ces outils permettent en particulier de réaliser des retouches locales sur l'image. C'est indispensable pour retoucher le ciel de nuit d'une part et le sol d'autre part. Je vous montre tout cela en vidéo :
J'espère que cet article vous sera utile et vous aidera à faire de belles images de Voie lactée, notre galaxie. Et surtout qu'il vous aura donné envie de tester, si ce n'est pas déjà fait. Les photos de Voie lactée sont parmi celles que je préfère : chaque séance est une petite aventure nocturne !
Si vous avez des questions ou des remarques, vous savez où me trouver : en commentaires 🙂
Bonjour
Il semble que sequator n’est plus disponible dans le playstore 🥺
Bonjour Joël, Sequator a supprimé son ancien site. Il est toujours librement disponible ici :
https://sites.google.com/view/sequator/
Merci pour ce tuto particulièrement riche en informations. Je vais essayer dès que possible, c’est sûr !